Titre : Oubliés
Auteur : José Rodrigues dos Santos, journaliste et écrivain portugais.
Date de parution (édition française) : octobre 2024 — environ 576 pages.
Genre : roman historique / de guerre.
Avec Oubliés, José Rodrigues dos Santos s’éloigne un instant des thrillers scientifiques qui ont fait sa renommée pour signer un roman historique ample, poignant, consacré à un pan méconnu de la Première Guerre mondiale : le destin tragique des soldats portugais envoyés sur le front des Flandres. Un récit dense et habité, qui mêle documentation rigoureuse et souffle romanesque.
Les oubliés de l’Histoire
Printemps 1917. Dans la boue et le froid du nord de la France, le capitaine Afonso Brandão et ses hommes attendent des ordres qui ne viennent jamais. Le Portugal, jeune République en crise, a envoyé ces soldats rejoindre l’effort allié — avant de les abandonner, littéralement, dans l’enfer des tranchées.
Dos Santos redonne chair à ces combattants effacés des manuels d’histoire, morts sans gloire ni mémoire, “oubliés” de tous sauf de ceux qui les ont aimés.
En choisissant ce sujet, l’écrivain portugais accomplit un travail de mémoire. Peu de lecteurs savent qu’en 1918, près de 60 000 soldats portugais combattirent aux côtés des Alliés dans le nord de la France — et qu’une grande partie d’entre eux furent décimés lors de la bataille de la Lys.
À travers Afonso Brandão, Dos Santos explore la dignité de ces hommes perdus dans une guerre qui n’était pas la leur. C’est aussi une réflexion sur le devoir, le courage et l’oubli, ces forces qui façonnent les peuples autant qu’elles les effacent.
Une fresque à hauteur d’homme
Le roman déploie plus de 500 pages où alternent scènes de guerre, réflexions intimes et une histoire d’amour avec Agnès, jeune Française croisée au détour du conflit. Cette romance, loin d’être anecdotique, apporte un contrepoint lumineux à la noirceur des combats.
Le style de Dos Santos, précis et visuel, fait revivre les odeurs, les bruits, la peur, la fatigue. L’auteur-journaliste, fidèle à son sens du détail, décrit les affrontements comme on documente un reportage de terrain.
Merci pour cet Hommage
La richesse documentaire du roman impressionne, mais sa densité peut aussi freiner la lecture. Certaines descriptions de tranchées, très fouillées, ralentissent le rythme. Le souffle narratif, lui, reste constant, servi par une écriture claire et un sens du tragique juste.
Dos Santos n’épargne rien à son lecteur : la boue, le sang, les ordres absurdes. Mais c’est dans cette rigueur que réside la force du livre — celle de rappeler que la guerre n’a jamais de “petits pays” ni de “petits héros”.
En redonnant voix aux “oubliés” du front portugais, José Rodrigues dos Santos signe un roman fort et nécessaire. Les Oubliés s’impose comme un hommage vibrant à la mémoire collective et à ces vies effacées par l’Histoire.
Un livre à lire pour ne plus jamais dire que certains combats n’ont pas compté.