
L’Amour, entre ombres et lumières – Roman initiatique
Alain Pozarnik
Selena éditions, 2025, 352 pages, 23 €
Dans la lumière vacillante de l’aube, où l’ombre s’efface pour laisser place à la promesse d’un jour naissant, le roman d’Alain Pozarnik, L’Amour, entre ombres et lumières, se présente comme une porte dérobée, un seuil initiatique invitant à plonger dans les profondeurs d’une âme en quête d’absolu.
Nous sommes conviés, dès les premières lignes, à suivre les pas d’un enfant solitaire, dont les échos des pas résonnent dans les corridors austères d’un pensionnat, lieu de mémoire et d’exil, mais aussi creuset où se forge une quête plus vaste, celle de l’amour comme voie de transformation. Alain Pozarnik, passeur de lumière et gardien d’une tradition maçonnique qu’il incarne avec une humilité rare, ne nous offre pas un simple récit, mais une méditation vibrante, une traversée où l’ombre et la lumière s’entrelacent pour révéler la vérité cachée de l’être. « La Vérité ne m’avait jamais été montrée par aucun dogme, aucune vérité à prendre, mais par la possibilité de me transformer par l’action… », écrit-il d’entrée.
Ce roman, par sa nature même, transcende les conventions du récit ordinaire. Il ne se borne pas à narrer, il fait surgir l’essence des choses ; il ne décrit pas, il suggère l’indicible. L’Amour, entre ombres et lumières, roman initiatique, suit la quête d’un enfant solitaire, du pensionnat à la maturité, où chaque rencontre féminine révèle une facette de l’amour comme voie de transformation. À travers une dialectique d’ombre et de lumière, le récit tisse une méditation sur la solitude, la sagesse et l’unité de l’âme. Ce voyage symbolique invite le lecteur à explorer sa propre intériorité, guidé par une écriture poétique et profondément maçonnique. À travers les souvenirs fragmentés de cet enfant devenu homme, nous sommes immergés dans une expérience où chaque épreuve, chaque rencontre, chaque silence porte la marque d’un enseignement voilé.
L’écriture d’Alain Pozarnik tisse un fil d’Ariane entre les polarités de l’existence : la solitude et la communion, la blessure et la guérison, l’ignorance et la sagesse. L’enfant, exilé dans un monde de murs froids, devient le miroir de notre propre exil intérieur, de ces moments où nous nous tenons au bord de nous-mêmes, cherchant un sens, un regard, une main tendue. Et c’est dans cette quête, dans ce désir ardent de dépasser l’isolement, que l’amour surgit, non comme un sentiment passager, mais comme une force alchimique, un feu qui purifie et éclaire.
Les figures féminines qui peuplent ce récit ne sont pas de simples personnages, mais des archétypes vivants, des reflets de l’éternel féminin qui, dans la tradition initiatique, guide l’âme vers sa complétude. Elles incarnent tour à tour la tendresse maternelle, la passion dévorante, la sagesse silencieuse, la compassion agissante. Chacune, dans sa singularité, est une facette du miroir tendu au narrateur, un appel à reconnaître en l’autre une part de soi, une invitation à franchir les limites de l’ego pour s’ouvrir à l’unité. Alain Pozarnik, avec une délicatesse rare, ne les réduit jamais à des symboles abstraits. Elles sont chair et souffle, regards et silences, présences qui ancrent l’initiation dans la réalité du vécu. À travers elles, l’amour se dévoile comme une voie, un cheminement où l’on apprend à donner sans posséder, à recevoir sans retenir, à s’unir sans se perdre.
Ce qui frappe, dans cette œuvre, c’est la manière dont Alain Pozarnik orchestre la dialectique de l’ombre et de la lumière, non comme une lutte, mais comme une danse. L’ombre, loin d’être un adversaire à vaincre, est honorée comme le lieu de la germination, le sanctuaire où l’âme se recueille, se dépouille, se prépare à l’éveil. La lumière, quant à elle, n’est pas une illumination soudaine, mais une clarté conquise, un horizon qui se dévoile à mesure que l’on accepte de traverser ses propres ténèbres. Nous retrouvons ici l’essence de la pensée maçonnique, où l’initiation n’est pas une fin, mais un processus, une alternance de morts et de renaissances, une alchimie où le plomb de l’ignorance se transmute en l’or de la connaissance. Alain Pozarnik, fidèle à cette tradition, nous rappelle que la lumière véritable n’existe que par l’ombre qu’elle éclaire, que l’amour véritable n’advient qu’en embrassant la totalité de l’être, blessures comprises.
La plume d’Alain Pozarnik, à la fois limpide et profonde, épouse le rythme secret de l’initiation. Chaque phrase semble pesée, polie, comme une pierre du temple intérieur dont il parle si souvent dans ses autres ouvrages. Les scènes, les dialogues, les silences mêmes sont autant de pavés posés sur le chemin de la quête, autant de symboles offerts à la méditation du lecteur. Nous sommes loin d’un récit linéaire car son roman s’écoule comme une rivière, sinueux, parfois tumultueux, parfois apaisé, mais toujours porteur d’une vérité plus vaste. Les murs du pensionnat, avec leur froideur oppressante, deviennent le symbole de nos propres enfermements, de ces prisons intérieures que nous construisons par peur, par doute, par refus d’aimer. Mais la lumière qui filtre à travers les fissures, la chaleur d’une rencontre, la douceur d’un regard nous rappellent que la délivrance est toujours possible, que la clé réside dans l’acte d’aimer, dans le courage de pardonner, dans l’audace de renaître.
Ce roman, par sa profondeur, interroge la nature même de l’amour. Aimer, est-ce posséder l’autre, se fondre en lui, s’oublier soi-même ? Alain Pozarnik nous entraîne au-delà des réponses convenues, vers un amour qui transcende les catégories, un amour qui est à la fois don et accueil, perte et plénitude, quête et accomplissement. Dans une phrase saisissante, il écrit que « aimer dans l’étreinte des corps, c’est prendre ; aimer dans l’élan des cœurs, c’est offrir ; mais aimer d’être à être, c’est s’unir à l’infini de l’univers ». Cette vision, profondément initiatique, fait de l’amour une voie spirituelle, une ascèse où l’âme s’élève en reconnaissant dans l’autre le reflet de l’éternel. Nous sommes invités à méditer sur cette vérité : l’amour n’est pas une fin, mais un passage, une porte ouverte sur l’infini, un pont jeté entre l’ombre de nos solitudes et la lumière de notre humanité partagée.
Alain Pozarnik, dont la vie elle-même est une quête de l’essentiel, incarne cette sagesse avec une belle authenticité. Né à Paris en 1939, il a d’abord exploré les chemins de l’art, assistant des cinéastes tels que Robert Bresson, Roger Vadim ou Jacques Rivette, avant de se tourner vers une recherche plus intérieure. Initié en 1972, il devient Grand Maître de la Grande Loge de France de 2004 à 2006, marquant la Franc-Maçonnerie d’une empreinte à la fois rigoureuse et poétique. Ses nombreux ouvrages, de Mystères et actions du rituel d’ouverture en loge maçonnique à Symbolisme du rituel de fermeture en loge maçonnique en passant par À la lumière de l’Acacia, La voûte sacrée – De la maîtrise à la perfection ou encore Le secret de la rose – De la perfection à l’amour témoignent d’une pensée vivante, ancrée dans la tradition mais ouverte à l’universel.
À travers ses écrits, Alain Pozarnik se révèle comme un passeur, un guide qui ne prétend pas détenir la vérité, mais qui invite chacun à la chercher en lui-même, dans le silence de son cœur, dans la lumière de ses rencontres.
Dans son dernier opus, où l’amour s’élève en pivot sacré, Alain Pozarnik nous offre un viatique lumineux, une flamme vacillante pour guider les nuits d’incertitude, un hymne vibrant aux aurores d’espérance.
Il nous apprend que l’initiation véritable ne réside pas dans les rituels, mais dans la capacité à accueillir l’autre, à reconnaître en lui le miroir de notre propre lumière, à marcher ensemble vers l’horizon de la sagesse. Nous refermons ce livre avec le sentiment d’avoir traversé une épreuve, d’avoir effleuré une vérité, d’avoir entrevu la possibilité d’aimer, pleinement, entre ombres et lumières. Et c’est là, peut-être, le plus grand don de notre Frère Alain Pozarnik : offrir à ses lecteurs non pas une histoire, mais une expérience, une invitation à devenir, à leur tour, des artisans de leur propre lumière.
L’Amour, entre ombres et lumières
Roman initiatique
Alain Pozarnik – Selena éditions, 2025, 352 pages, 23 €
Le site de l’éditeur https://selena.paris/catalogue/romans-litterature/lamour-entre-ombres-et-lumieres/